La nuit, une ressource à préserver

Jeudi 13 novembre, Reyssouze &Affluents proposait une soirée une projection du documentaire « Où sont passées les lucioles ? » de Corentin Kimenau, suivie d’une table ronde avec le réalisateur, accompagné de :

  • Jean-Claude Alléhaux, président de l’Association astronomique de l’Ain,
  • Emma Renard, chargée de mission au syndicat,
  • Emilie Audoux, chargée de participation citoyenne au syndicat, pour animer les discussions. 

Dès les premières minutes, le public se saisit du micro :
« J’aimerais bien revoir une luciole, parce que c’est joli quand ça fait de la lumière », raconte une enfant. Une autre partage un souvenir : une nuit dehors, à Jasseron, « où on a vu la Voie lactée et appris les constellations ».

Ces anecdotes résonnent avec le film de Corentin Kimenau qui, avec poésie, interroge notre rapport à l’obscurité.
Le réalisateur confie n’avoir « jamais vu de lucioles de [sa] vie », mais avoir passé trois ans à documenter les vers luisants, ces insectes qui « se perdent dans les halos lumineux et ne se retrouvent plus pour se reproduire »

Jean-Claude Alléhaux, président de l’Association astronomique de l’Ain, rappelle qu’une commune sur deux de moins de 5 000 habitants pratique aujourd’hui l’extinction nocturne, mais seulement 23 % des villes de plus de 40 000 habitants.  Résultat : « Lever la tête ne suffit plus pour voir les étoiles. »

Dôme lumineux au-dessus de Bourg-en-Bresse, ©Jean-Claude Alléhaux

Le public s’interroge : « Est-ce qu’une route éclairée peut vraiment couper le passage des animaux ? « 

La réponse d’Emma Renard est sans appel : oui.
Et c’est précisément le cœur de son travail.

Après avoir modélisé la trame turquoise (les continuités écologiques des milieux humides), le syndicat a ajouté une nouvelle couche d’analyse : la trame noire, c’est-à-dire l’impact de la lumière artificielle sur les déplacements de la faune.

En projetant les cartes du territoire, Emma explique :
« Un réservoir de biodiversité peut paraître fonctionnel le jour… mais devenir infranchissable la nuit. »
Sur la carte, presque tous les réservoirs bleus deviennent orange lorsqu’on ajoute la pollution lumineuse.

À l’échelle locale, l’effet est concret :

  • une route éclairée peut détourner les chauves-souris de leur corridor de chasse,
  • une ligne de lampadaires peut empêcher une salamandre de rejoindre une zone humide,
  • certaines espèces, attirées par les LED, augmentent leur risque de collision avec les voitures.

« En réduisant la lumière, on améliore le fonctionnement de tout l’écosystème ! « , résume Emma.

Comment agir sur le territoire ?

« Quand on rentre dans la technique pure, on a besoin de ce genre de d’outils pour vulgariser et mettre des choses en place », souligne Corentin. 

Comme Emma l’explique, le syndicat accompagne désormais les communes avec :

  • Des cartes personnalisées,
  • Des conseils techniques et une boîte à outil pour intégrer les trames dans les documents d’urbanisme,
  • Un travail de sensibilisation et de formation.

 

Et rappelle que parfois, agir revient aussi à se poser une simple question : « Ce lampadaire, ce spot, est-il vraiment utile ici ? »

En fin de soirée, chacun est invité à imaginer une société qui vivrait mieux avec l’obscurité.

Jean-Claude propose un changement de regard :
« Ne parlons plus de pollution lumineuse, mais de l’obscurité comme d’une ressource. »

Emma ajoute :
« Ramener de la nuit en ville, c’est aussi ramener du lien entre tous les êtres vivants — dont nous faisons partie. »

Corentin conclut avec simplicité :
« Redonner à la nuit un rôle de refuge, c’est autant une affaire technique qu’humaine. »

Voir le documentaire :

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